Séverin Naudet (photo) était l’invité du dernier petit déjeuner du CPN. Le patron de la mission
ETALAB, chargé du portail français de données publiques, a rappelé les enjeux du mouvement Open Data. L’ancien
ministre Jean-Jacques de Peretti a également délivré sa vision de l’ouverture des données publiques que son expérience de maire et son rapport lui ont apportée.
C’est une révolution. L’ouverture des données publiques va transformer durablement l’action publique et la démocratie.
C’est en tous les cas l’avis de Séverin Naudet, patron de la mission Etalab chargée du premier portail français des données publiques (data.gouv.fr) et de l’ancien ministre Jean-Jacques de
Peretti, tous deux invités à s’exprimer devant les membres du Club parlementaire du numérique. Grâce à l’Open Data, des applications verront le jour avec des données fournies par les différentes
administrations : qualité de l’eau et de l’air près de chez soi, carte des accidents de vélos pour repérer les endroits dangereux…
« L’Open Data va permettre à l’élu d’attirer des personnes dans le débat qui ne s’exprimaient pas
avant » affirme Jean-Jacques de Peretti (photo), auteur d’un rapport remis au Président de la République sur la clarification des compétences des collectivités
territoriales dans lequel il dit sa conviction selon laquelle les collectivités territoriales doivent se« lancer avec volontarisme dans l’open data ». L’ancien ministre
voit dans ce mouvement d’ouverture des données le moyen idéal pour les citoyens de s’approprier le débat. Une troisième intervenante, Marion de Lasterie (photo), conseillère numérique du
président du conseil général du Loir-et-Cher (Maurice Leroy) a permis d’entrevoir quelques applications concrètes de l’Open Data. Le département a en effet participé à « une
démarche collective et transpartisane d’expérimentation » de libération des données publiques autour de l’observatoire 41 et de son portail de données, « pilot
41 ».
Cette politique a à son actif quelques résultats puisque plusieurs applications ont vu le jour à l’instar d’un
annuaire des élus ou une application sur les randonnées pédestres (en partenariat avec le Centre de Tourisme du Département). Plusieurs appels à projets ont aussi été lancés.
« Exigence démocratique »
« L’ouverture des données publiques est d’abord et avant tout une exigence
démocratique » insiste pour sa part le patron de la mission Etalab. « Internet a changé le rapport de
nos concitoyens à l’accès à l’information et au savoir. » Et de préciser : « Les citoyens ont désormais une exigence accrue quant à l’accès universelle à
l’information et au savoir dont les données publiques font partie ». De cette exigence d’accès universel découle très vite une exigence
de « transparence ». C’est pourtant une tradition de « secret », comme le rappelle le député Jean Dionis du Séjour, qui a animé
l’administration française jusqu’à aujourd’hui. Ce secret levé permettrait une évaluation des politiques publiques plus efficace et réaliste. Les think tanks, les associations, des blogs pourront
s’emparer, pour étayer leurs études, de données publiques aujourd’hui jalousement gardées par les administrations.
Gratuité des données
Question longtemps sensible, l’Etalab a choisi la gratuité des données publiques. L’Etat sera-t-il pour autant le
grand perdant de l’ouverture des données publiques ? Aucunement selon Séverin Naudet qui explique qu’un nouveau secteur économique est en train de naître autour de l’Open Data qui
bénéficiera à l’Etat via l’impôt sur les sociétés et la création d’emplois…
Des questions ont permis de préciser quelques points. Vincent Talvas (SFR) a ainsi souligné le risque de
captation des données par des grands opérateurs américains qui pourrait les utiliser à des fins commerciales. On pense aux horaires de trains par exemple qui pourraient servir à des agences de
voyages internationales. Le patron de la mission Etalab peut ainsi rappeler la différence entre « les données publiques et les données des entreprises publiques qui ne sont pas
concernées par la loi de 1978 modifiée en 2005. » Les données des entreprises publiques ne sont donc pas considérées comme de l’Open Data. Séverin Naudet considère cependant que
des données d’entreprises publiques concernant une mission de service public pourraient également être libérées. L’Open Data n’en est qu’à ses débuts et le patron de la mission Etalab appelle de
ses voeux un débat parlementaire sur le sujet. Il faudra peut-être attendre les premiers résultats spectaculaires d’une application née grâce à l’Open Data. Certains parlementaires n’attendent
que ça…
Pierre Laffon
Voir aussi l’interview de Séverin Naudet